Jeudi 25 août 2022, s'est tenue au cimetière la cérémonie de commémoration du 78e anniversaire de la libération de Fleury-Mérogis.
DISCOURS DE MONSIEUR LE MAIRE
Mesdames, Messieurs,
En cet été 1944, la France sortit de la pénombre dans laquelle l’avait emmenée le régime de Vichy quatre ans auparavant.
La France n’était plus à Londres, mais enfin de retour chez elle, retrouvant sa dignité, sa souveraineté, marquant ainsi la fin de quatre longues années d’occupation. Quatre années d’humiliation, de tyrannie et d’abandon… Quatre années pendant lesquelles les fossoyeurs de la République, Pétain et Laval en tête, s’étaient fourvoyés dans le déshonneur, la déportation, la collaboration d’État…
Quatre années où l’État et la République s’étaient divisés. Pendant que l’État français se déshonorait dans la lâcheté et la collaboration, la République survivait et résistait dans les maquis.
Depuis les annonces du recul des armées nazies à l’Est, du débarquement allié en Normandie, puis celui de Provence, un immense espoir se leva en Europe et dans tout le pays.
En France, les maquis appuyaient l’avancée des alliés, en sabotant ponts et usines, en intensifiant la guérilla urbaine féroce contre l’occupant nazi.
Peu à peu, l’état de la collaboration s’effondrait, au bénéfice de la République du Conseil National de la Résistance.
Avec l’arrivée des troupes Françaises libres et alliées, une liesse populaire envahit les communes libérées. De grandes fêtes de la Libération furent organisées spontanément.
C’est ainsi que le 24 août 1944, les Floriacumois accueillirent à bras ouverts les soldats de la 4e DB du général Barton, qui arrivèrent sur notre commune par l’ancienne route du Plessis-le-Comte, là où se trouve actuellement la maison d’arrêt.
De la vie triste et morose de l’occupation s’ensuivit une explosion de joie, la joie d’une liberté retrouvée, la joie de tout un peuple reprenant son destin en main.
En cet été 1944, la France est un pays à genoux. Tout est à reconstruire. C’est un pays au bord de l’abime que l’on retrouve, une ancienne grande puissance déchue, qui n’est plus que l’ombre d’elle-même, malgré la France libre, malgré la Résistance…
Le poète Louis Aragon disait de l’état du pays – je cite : « J’écris dans ce pays que le sang défigure. Qui n’est plus qu’un monceau de douleurs et de plaies. Une halle à tous vents que la grêle inaugure. Une crise où la mort s’exerce aux osselets. »
Dans ce champ de ruines, Les Français étaient également en attente de justice et de réparation. Car la Libération ne pouvait effacer d’un seul trait les blessures profondes endurées sous l’occupation.
Malgré la dureté de la guerre qui était encore lourdement ressentie dans le quotidien des Français, la Libération ouvrit une nouvelle ère politique, celle de la République sociale, et avec elle la promesse de jours plus heureux…
Pour le Général de Gaulle, pour la Résistance, il ne s’agissait plus de retrouver la France de la IIIe République, mais bien de bâtir une « France nouvelle », débarrassée du venin fasciste.
Dans sa déclaration à la Résistance qu’il remit à Christian Pineau au cours du mois de mars 1942, le Général de Gaulle préfigurait ce qui attendait le pays une fois libéré :
« Le peuple français, tandis qu’il s’unit pour la victoire, se rassemble pour une révolution politique, économique et sociale. Il appelle une République nouvelle, plus dure et pure que la IIIe République, une République qui donne la pleine citoyenneté aux femmes comme aux hommes. Il faudra que soient réalisées contre la tyrannie du perpétuel abus, les garanties pratiques qui assureront à chacun la liberté, la dignité de son travail et dans son existence.
La sécurité nationale et la sécurité sociale sont pour nous des buts impératifs et conjugués. »
Pour mettre fin à la guerre, il fallait s’en prendre à ses causes profondes, à la misère humaine qui nourrit les peurs et les haines…
L’été 1944 marqua ainsi l’année zéro d’une République « nouvelle », s’inscrivant dans le sillage de la constitution de 1793.
Droit de vote des femmes, nationalisations des banques, de l’industrie, des houillères, création de la Sécurité sociale… la Libération accoucha bel et bien d’une révolution politique, économique et sociale par l’ampleur des réformes profondes engagées par le gouvernement provisoire.
Une révolution sans guerre civile, reposant sur un large consensus politique issu du CNR et du programme des « jours heureux ».
Totalement discrédité par la collaboration économique, le grand patronat ne pouvaient s’y opposer.
C’est bien là la force de la Résistance française. Malgré les divergences qui la traversaient, son unité ne vola pas en éclat face à l’exercice du pouvoir…
Jusqu’en 1947, communistes, socialistes, gaullistes, gouvernèrent ensemble la France, posant les bases d’une République résolument sociale, dont les grands acquis démocratiques sont encore au fondement de notre pacte républicain.
Cette mémoire de la libération, nous rappelle que l’avenir d’un peuple, d’une Nation, et je dirais même d’une communauté de destin comme l’Europe, ne se prépare qu’en prenant pour appui son histoire. Une histoire complexe, balançant sans cesse entre violence et espoir.
Je le dis à notre jeunesse : dans l’Histoire, rien n’est irréversible, pas même les pires horreurs si nous n’y prenons pas garde.
N’oublions pas vers quelle ignominie, quelle cruauté, peut aller la nature humaine. Souvenons-nous pour ne pas revivre de telles tragédies.
Soyons dignes de la mémoire de nos soldats, de nos résistants, de nos alliés, de tous ceux qui prirent les armes pour défendre la République.
Si nous vivons libres et en démocratie aujourd’hui, c’est bien grâce à toutes ces vies courageuses qui nous ont précédés.
Aujourd’hui, en leur rendant hommage, nous perpétuons l’héritage de la Libération et de son idéal démocratique, nous poursuivons l’œuvre de mémoire pour ne jamais oublier.
Vive la France ! Vive la République ! Vive Fleury-Mérogis !